12 OCTOBRE – 16 OCTOBRE 2022

De Villon à Vian, une anthologie de Maurice Aufair

Conception et interprétation Maurice Aufair. Avec la complicité de Françoise Courvoisier
Lumière Rinaldo Del Boca. Son Nicolas Le Roy. © Diane Bouchet

 

Horaires
Mercredi, jeudi, samedi 19h • Vendredi 20h30 • Dimanche 17h

SYNOPSIS

De François Villon à Boris Vian, en passant par Ronsard, Lamartine, Baudelaire, La Fontaine, Michaux… avec la simplicité qu’on lui connaît, le comédien Maurice Aufair nous propose un florilège de ses textes préférés : des chefs d’oeuvre tels que cette célèbre Ballade des pendus de Villon, à des textes moins connus, qu’il nous fera découvrir.

 

Frères humains qui après nous vivez
N’ayez pas les coeurs contre nous endurcis…

 

Maurice Aufair a joué d’innombrables rôles chez Molière. Beckett, Pinter, Miller, Gogol, Reza, Dürrenmatt… Aux Amis, on se souvient de la qualité exceptionnelle de ses deux dernières prestations : d’abord dans Haldas Aufair en 2019, puis l’année suivante dans Séance de Michel Viala, dont il avait créé le rôle en 1974 au Théâtre de Carouge  et qu’il rejouait pour la cinquième fois aux côtés d’une nouvelle partenaire de jeu, Charlotte Filou. Dernièrement, à l’occasion de ses 70 ans de théâtre, la projection du film En attendant Godot, réalisé par Plans-Fixes, mettait en lumière le charisme de ce très précieux comédien romand, face au journaliste Patrick Ferla.

Production Les Amis – Le Chariot

 

LA PRESSE 

RETROUVER L’AMOUR DE LA POÉSIE
La Pépinière, 16 octobre 2022

Maurice Aufair est sur la scène des Amis musiquethéâtre, quatre soirs durant, pour présenter des Poèmes processionnaires. Pendant une petite heure, il lit et déclame ses poèmes préférés, entre classiques et jolies découvertes.

De Villon à Vian, en passant par Baudelaire, Apollinaire, Verlaine ou encore Henri Michaux, Maurice Aufair propose une véritable anthologie de la poésie française, sous la forme d’un florilège de ses textes préférés. Avec toute sa malice, il passe d’une déclaration d’amour à la Ronsard à un texte plein d’ironie façon Prévert, avant de revenir à l’apparente légèreté du Dormeur du val de Rimbaud. Assis derrière son secrétaire posé sur un tapis aux tons orangés, il enchaîne ainsi les poèmes, sans transition ou presque. Avec toujours son verre de rouge posé à côté de lui, une petite gorgée entre chaque texte… il faut bien s’hydrater ! Avec lui, on redécouvre avec plaisir des textes qu’on a lus à l’époque du collège, on en entend de nouveaux, mais toujours avec l’infinie tendresse qu’il partage sur scène.

La mélodie des mots
« Qu’il soit dans ton repos, qu’il soit dans tes orages,
Beau lac, et dans l’aspect de tes riants coteaux,
Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages
Qui pendent sur tes eaux.
Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,
Que les parfums légers de ton air embaumé,
Que tout ce qu’on entend, l’on voit ou l’on respire,
Tout dise : Ils ont aimé ! »
(Alphonse de Lamartine – Le La

En déclamant ces poèmes, Maurice Aufair nous rappelle qu’ils ont été écrits pour être prononcés. Tout le sel de la poésie ne réside-t-il pas dans l’art de faire chanter les mots ? À entendre le comédien, les mots coulent avec toute la douceur nécessaire. De vieux souvenirs remontent à la surface, et l’on se prend à réciter dans sa tête des vers qu’on avait appris à l’époque du collège.

« Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
Assise auprès du feu, dévidant et filant,
Direz, chantant mes vers, en vous émerveillant,
Ronsard me célébrait du temps que j’étais belle »
(Pierre de Ronsard – Quand vous serez bien vieille)

Ces moments m’ont rappelé ce que nous évoquions il y a quelque temps avec Lou Ciszewski, en parlant de Bolts of Melody : la poésie rappelle pour beaucoup un exercice fastidieux et pas forcément agréable, celui de venir réciter des vers au tableau devant la classe… Avec Maurice Aufair, cet exercice prend un tout autre sens. La beauté et l’émotion prennent le dessus, parce qu’il a soigneusement choisi ces vers, les a laissés s’imprégner en lui, pour mieux les laisser ressortir avec l’intention qu’ils méritent. La douceur de sa voix et son œil brillant en viennent même par moments à contraster avec la tristesse, voire la violence de ce qui est raconté, qu’il s’agisse de la mort chez Rimbaud, d’un dur combat chez un autre poète dont le nom m’échappe, ou encore de la perte d’un amour dans ces vers bouleversants de Louis Aragon :

« Parce que j’ai voulu te redire Je t’aime
Et que ce mot fait mal quand il est dit sans toi »
(Louis Aragon – Le Crève-Cœur)

À la fin de cette lecture, c’est une forme d’apaisement qui domine : on vient d’assister à un moment hors du temps, qui nous fait nous sentir plus léger qu’on ne l’était en arrivant. Il n’y a pas eu à réfléchir, juste à écouter, à ressentir et renouer avec de vieux souvenirs. Comme une parenthèse oxygénée dans notre quotidien si stressant, cette heure de Poèmes processionnaires arrive à point nommé. Ou quand beauté rime avec simplicité.
Fabien Imhof